Historiquement, les Jeux olympiques ont toujours donné lieu à de grands projets urbains. Paris 2024 ne déroge pas à la règle, même si la ville organisatrice a intégré bien moins que ses prédécesseuses et met l’accent sur un projet durable. À un an du coup d’envoi de la compétition, entretien avec Alexandre Faure, chercheur en études urbaines à l’EHESS.
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RFI : En quoi Paris se distingue-t-elle des villes organisatrices précédentes ?
Alexandre Faure : De manière générale, la singularité de Paris par rapport aux anciennes villes qui ont eu les JO, c’est de présenter le programme le moins ambitieux sur le plan urbain. C’est-à-dire celui qui prévoit le moins de constructions nouvelles, avec seulement le village olympique, le centre aquatique olympique et quelques aménagements temporaires. Cela fait certainement de Paris l’une des candidatures qui seront les plus vertueuses sur le plan environnemental. Parce que c’est quand on l’intègre qu’on est mauvais sur le plan environnemental.
Elle est construite très peu et privilégie des solutions durables. Cette ambition environnementale, c’est nouveau pour une ville organisatrice ?
À ce niveau-là, oui. Pour plusieurs raisons. D’une part, la prise de conscience a été lente sur la question environnementale dans le cadre olympique. Le contexte était différent pour les villes précédentes, qui se résumait à des moments de développement de leurs infrastructures et de leurs équipements. Barcelone en 1992, toutes les villes ont utilisé les Jeux comme levier pour construire beaucoup : des équipements sportifs, des infrastructures routières, des transports, des logements… Paris est la seule à ne pas être dans cette situation. Mais ça ne veut pas dire qu’on ne construit pas à Paris. Les Jeux interviennent à un moment où l’on construit beaucoup de manière générale tout autour de Paris. Contrairement aux villes précédentes, Paris n’avait donc pas besoin des Jeux comme d’un levier d’activation des ressources pour construire.
Par ailleurs, les Jeux de Paris sont les premiers pour lesquels ils appliquent l’Agenda 2020 du Comité international olympique, qui vise à la diminution des émissions de gaz à effet de serre lié aux JO. Enfin, Paris était la seule candidate sérieuse pour les Jeux de 2024. Elle n’a donc pas eu besoin de se livrer à une surenchère pour les obtenir, contrairement à ce qui se pratiquait depuis les JO de 1992. Il existait jusque-là une tendance qui incitait à construire beaucoup afin de prouver au CIO le sérieux de sa candidature. En se partageant le gâteau avec Los Angeles – à elle les Jeux de 2024, à Los Angeles ceux de 2028 – Paris a pu sortir de cette dynamique.
Ces nouvelles constructions – le village olympique qui a vocation à être transformé en écoquartier, le centre aquatique – sont-elles durables parce que c’est comme ça qu’on construit aujourd’hui, ou est-ce vraiment un point sur lequel Paris voulait mettre l’accent ?
Les deux. Et puis les Jeux sont aussi une vitrine du savoir-faire français, notamment dans la construction en bois. En la matière, le centre aquatique est une prouesse architecturale qui rappelle d’ailleurs les nouvelles Halles à Paris : une construction très légère, de grands volumes… La recherche d’un geste architectural conduit à mettre en valeur de nouvelles techniques ou des innovations dans le bâtiment.
Les Jeux de Paris vont marquer un tournant environnemental dans l’olympisme. Mais ce tournant, c’est celui de toute la société. Il n’y a pas de singularité des Jeux. Par exemple, sur les chantiers du Grand Paris Express pour le nouveau métro, on met aussi énormément en avant la question environnementale en utilisant la voie fluviale pour évacuer les déchets, en construisant des stations de métro qui respectent les matériaux, en utilisant le moins de matériaux polluants possibles… Le tournant était déjà engagé.
Paris 2024 communiqué beaucoup sur l’innovation environnementale, en présentant ces Jeux comme un laboratoire d’innovations vertes. Les JO ont-ils toujours eu ce rôle de laboratoire ?
Oui, dans le sens où les Jeux produisent un projet urbain tout à fait singulier dans l’histoire de l’urbanisme mondial, en obligeant les villes à livrer tous leurs équipements en seulement sept ans. Cela force à innover dans la construction, la manière dont on n’utilise pas les matériaux.
Dans la narration des politiques publiques, l’innovation revêt un aspect positif. C’est ce qui a permis d’avoir tiré d’une nouveauté des richesses. Mais il existe un autre genre d’innovation, dont on parle peu alors qu’il est important : la dérégulation de l’urbanisme. Pour construire le centre aquatique olympique ou le village des athlètes, on a fait passer une loi olympique qui diminue les règles liées à l’urbanisme. On réduit la concertation, la phase de diagnostic, la phase d’étude, on accélère les ventes de parcelles et leur achat par l’État. Ce sont aussi des innovations en matière de sécurité, avec le risque d’une diminution des libertés individuelles…
Paris 2024 veut être un tremplin pour ces innovations vertes. Les Jeux ont-ils pu permettre à ces innovations d’être ensuite développées à grande échelle ?
Les Jeux sont vraiment un levier par la taille des chantiers engagés. Cela permet à des entreprises, des industries, de construire une filière. Le passage le plus difficile dans l’innovation, c’est la mise à l’échelle, c’est-à-dire le passage de l’objet unique innovant à sa généralisation. En cela, les Jeux ont certainement une vertu très forte. En construisant autant d’immeubles, en construisant aussi vite des choses nouvelles, on se rend compte de ce qui est généralisable ou non.
Quel peut être l’impact de ces aménagements sur les populations ?
Le premier impact, c’est que les populations vivent dans des chantiers pendant sept ou huit ans. Ce n’est pas rien. Mais dans ces quartiers, la qualité de vie va être nettement améliorée, c’est indéniable. Les populations qui bénéficieront de logements de bonne qualité, en tout cas pour les premières années.
Mais cette qualité de vie dépend aussi du développement du tissu commercial, si les commerces seront facilement accessibles à pied ou non. Et cela, on l’ignore. Parce qu’on est dans une société libérale et qu’on n’impose pas à un commerçant de s’installer à tel ou tel endroit. Tout dépendra si une offre commerciale et de services à la hauteur du nombre d’habitants se développera dans ce futur écoquartier. Et cela, on ne pourra le savoir que deux ou trois ans après les Jeux.
L’amélioration de cette qualité de vie va-t-elle avoir un impact sur le prix de l’immobilier et conduire à une gentrification ?
La banlieue parisienne n’a pas attendu les Jeux pour avoir une augmentation des prix de l’immobilier. À Saint-Ouen, Saint-Denis ou l’Île-Saint-Denis, le nombre de constructions qui ne sont pas liées aux Jeux est largement supérieur à celui des constructions liées aux Jeux. Les Jeux ne modifient pas la dynamique en cours, qui est une dynamique de construction massive en région parisienne. Une dynamique qui est plus forte qu’ailleurs en France et qui entraîne bien évidemment une augmentation de l’immobilier. Mais c’est une augmentation qui existe depuis des décennies, voire un bon siècle et demi.
Bibliographie :
Affaire Priore/Le Calendrier de l’Affaire Priore/1980.,Infos sur ce livre.
La France Sous Les Derniers Capétiens.,A découvrir .
Photographie/Personnalités/W/Joel-Peter Witkin.,A voir .
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